Éric Zemmour, né le 31 août 1958 à Montreuil, est un journaliste, écrivain, essayiste, éditorialiste, chroniqueur, polémiste et homme politique français d’extrême droite.
Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, il commence une carrière dans la presse écrite en travaillant au Quotidien de Paris de 1986 à 1994. Il rejoint en 1996 le service politique du Figaro, où il reste jusqu’en 2009 et revient en 2013, tout en écrivant des chroniques au Figaro Magazine jusqu’en 2021.
Sa notoriété s’accroît grâce à la radio et la télévision : il intervient dans Ça se dispute sur I-Télé de 2003 à 2014, dans On n’est pas couché sur France 2 de 2006 à 2011, sur RTL de 2010 à 2016, Zemmour et Naulleau sur Paris Première de 2011 à 2022 et sur CNews dans Face à l’info de 2019 à 2021. En outre, ses essais rencontrent d’importants succès de librairie et suscitent des polémiques.
Fréquemment poursuivi en justice pour ses déclarations controversées, il est condamné notamment pour des provocations au racisme, à la haine envers les musulmans, incitation à la haine et injure raciste.
À la fin de l’année 2021, il annonce sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 et fonde le parti politique Reconquête, dans une optique d’union des droites autour de thèmes identitaires et nationalistes. Il arrive quatrième du premier tour, avec 7,07 % des suffrages exprimés. Il échoue ensuite à se faire élire député dans la quatrième circonscription du Var en étant éliminé dès le premier tour, tout comme l’ensemble des candidats de son parti.
Situation personnelle
Naissance et famille
Né à Montreuil (département de la Seine, aujourd’hui en Seine-Saint-Denis) le 31 août 1958, Éric Justin Léon Zemmour est issu d’une famille populaire de Berbères juifs d’Algérie originaire de Sétif dans l’ancien département de Constantine, arrivée en France métropolitaine en 1952. Ayant reçu la nationalité française en 1870 après le décret Crémieux, elle en est déchue par le régime de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale. À leur arrivée en banlieue parisienne, ses grands-parents paternels, Liaou et Messouka, adoptent les prénoms Justin et Rachel, et sa grand-mère maternelle, Ourida, privilégie Claire, son second prénom, alors que son mari s’appelle Léon.
D’après l’historien Benjamin Stora, Éric Zemmour est « juif arabe » mais préfère se présenter comme « juif berbère ». Selon Mohammed Ibn Najiallah dans son livre Les Fables d’Éric Zemmour : autopsie d’un sophiste, la famille de Zemmour est en réalité d’origine séfarade, avec des ancêtres probablement venus de la péninsule Ibérique, plus précisément de la région de Zamora en Espagne.
Mariés à Sétif, ses parents quittent l’Algérie française en 1952 avec leurs propres parents et leurs fratries. Dans cette famille juive séfarade, le patriotisme est une valeur cardinale et la question de l’identité est centrale, raconte le journaliste Étienne Girard dans son livre-enquête Le Radicalisé. Son père, Roger Zemmour (1932-2013), est préparateur en pharmacie, puis directeur d’une société d’ambulances ; sa mère, Lucette Lévy (1936-2010), est femme au foyer. Son père étant souvent absent, il est principalement élevé par sa mère et sa grand-mère maternelle.
Élevé dans le judaïsme, il connaîtrait l’hébreu. Dans la sphère privée, il suit les prescriptions de la Halakha et fréquente la synagogue, au moins jusqu’à la mort de son père en 2013 ; il déclare que son prénom dans la sphère confessionnelle est « Moïse ».
Formation
Éric Zemmour passe son enfance à Drancy puis à Stains, il est scolarisé dans des établissements confessionnels privés en classes non mixtes à l’école Lucien-de-Hirsch (Paris) puis fréquente le groupe scolaire Yavné, dans le 13e arrondissement de Paris, où il est ailier gauche de son club de football, le Yavné Olympique Club, alors qu’il vit son adolescence rue Doudeauville, dans le quartier parisien de Château Rouge.
Diplômé (D – Service public, 1979) de l’Institut d’études politiques de Paris, Zemmour échoue par deux fois au concours d’entrée de l’École nationale d’administration, en 1980 et 1981, la première fois aux oraux – René Rémond est au jury et l’interroge notamment sur le nombre annuel de touristes en Espagne -, la seconde aux écrits.
Zemmour a été exempté du service militaire en raison d’une monoarthrite du genou avec épanchement de synovie.
Vie privée
En 1982, Éric Zemmour se marie avec Mylène Chichportich, administratrice judiciaire puis avocate spécialisée en droit des faillites, née à Montreuil d’une famille juive tunisienne. Ensemble, ils ont deux garçons, Hugo (1997-) et Thibault (1998-), ainsi qu’une fille, Clarisse (2004-). L’aîné est mis en examen et placé sous contrôle judiciaire en 2023 pour avoir fait deux blessés graves en conduisant en état d’ivresse, ainsi que pour le port non-autorisé d’un couteau à cran d’arrêt.
À partir de 2021, Sarah Knafo est présentée dans les médias comme la compagne de Zemmour, ce qu’il confirme en janvier 2022.
Carrière professionnelle
Journaliste politique dans la presse
Au début des années 1980, après six mois à l’agence de publicité FCA où Éric Zemmour écrit des slogans, il est stagiaire au Quotidien de Paris où le « critique musical Marcel Claverie lui fait écrire son premier article », avant d’y être embauché en 1986 comme journaliste au service politique par le directeur Philippe Tesson.
Après la fermeture du Quotidien de Paris en 1994, Zemmour est éditorialiste à InfoMatin pendant un an puis rejoint en 1996 Le Figaro, en tant que journaliste politique. Il est parallèlement pigiste pour Marianne en 1997, et pour Valeurs actuelles en 1999.
Selon Libération, il plaide, dès les années 1990, pour « l’union des droites », « fort d’une proximité cultivée avec le fondateur du Front national, Jean-Marie Le Pen, qu’il est le seul journaliste à appeler “président”, et avec son rival Bruno Mégret ».
En 2009, sa collaboration cesse avec Le Figaro : Étienne Mougeotte lui reproche les propos tenus sur Canal+ selon lesquels « la plupart des trafiquants sont noirs et arabes », qui lui vaudront d’être condamné pour provocation à la discrimination raciale ; mais selon Électron libre de France Inter, cette rupture est surtout due au fait qu’il était payé 9 700 euros par mois pour un faible nombre de publications. À partir de 2010, Zemmour est chroniqueur dans Le Figaro Magazine. Il revient au Figaro en 2013, présentant une chronique sur un livre dans son supplément hebdomadaire, Le Figaro littéraire. Il suspend finalement sa participation au Figaro et au Figaro Magazine en septembre 2021, pour promouvoir son livre La France n’a pas dit son dernier mot alors que les spéculations sur sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 s’intensifient.
Il est également chroniqueur politique au Spectacle du monde, mensuel politique du groupe Valeurs actuelles, de 2013 jusqu’à l’arrêt de la publication en juillet 2014.
Écrivain et essayiste
Éric Zemmour est l’auteur des biographies d’Édouard Balladur (Balladur, immobile à grands pas, 1995) et de Jacques Chirac (L’Homme qui ne s’aimait pas, 2002) ainsi que d’essais politiques. Il publie notamment en 2006 Le Premier Sexe, essai sur ce qu’il juge être une féminisation ou une dévirilisation de la société. Il participe à l’élaboration des textes du film Dans la peau de Jacques Chirac de Michel Royer et Karl Zéro même si ce dernier déclare n’avoir que « bien peu » gardé de son texte. En 2008, il publie Petit Frère, roman dans lequel il attaque l’« angélisme antiraciste ». En mars 2010, avec Mélancolie française (essai avec lequel il a remporté le prix du livre incorrect), il revisite l’histoire de France.
En 2014, sort son livre Le Suicide français. Il y défend la thèse d’un affaiblissement progressif de l’État-nation français depuis les années 1970, qu’il attribue notamment à l’emprise de la « génération Mai 68 ». Le livre rencontre un succès de librairie à sa parution et l’auteur est décrit comme un « phénomène ».
Dans Destin français, publié en 2018, il dresse un parallèle entre son récit autobiographique et divers évènements historiques qui l’ont marqué. Il revient ensuite sur des pages de l’histoire de France marquantes de son point de vue, et termine son essai sur l’influence de l’islam qu’il juge grandissante au sein de la société française.
Son ouvrage La France n’a pas dit son dernier mot (2021) lui permet de vendre 165 000 exemplaires en trois semaines, ce qui lui rapporterait une somme estimée par Le Parisien à 1,3 million d’euros à titre personnel.
Activité d’auto-éditeur
En 2008, Éric Zemmour et son épouse fondent la société Rubempré, dont ils détiennent la totalité du capital. Le nom de la société s’inspire de celui de Lucien de Rubempré, personnage de La Comédie humaine d’Honoré de Balzac. En septembre 2021, après avoir été refusé par son éditeur Albin Michel, son livre La France n’a pas dit son dernier mot est publié par cette société, qui étend pour l’occasion son activité à l’édition d’ouvrages.
Débatteur, polémiste et éditorialiste dans l’audiovisuel
À partir de septembre 2003, Éric Zemmour participe à l’émission hebdomadaire Ça se dispute sur la chaîne d’information en continu I-Télé, face à Christophe Barbier jusqu’en 2006 puis Nicolas Domenach. Il est licencié en décembre 2014, I-Télé mettant fin à l’émission après les propos tenus par Zemmour au journal Corriere della Sera concernant les musulmans. Poursuivie par le journaliste, la chaîne est condamnée le 22 novembre 2016 pour « rupture brutale et abusive du contrat de travail, sans préavis et sans invoquer aucun manquement contractuel » à payer 50 000 € à la société qui gère les intérêts de Zemmour.
Il participe aussi à l’émission Vendredi pétantes sur Canal+ jusqu’en juin 2006.
Après avoir écrit deux biographies de personnalités politiques au tirage modeste, il se tourne en 2006-2007 vers les sujets sociétaux, sur un ton plus polémique. Son passage à l’émission Tout le monde en parle de Thierry Ardisson en mars 2006, lors de la promotion de son livre Le Premier Sexe et le vif débat avec Clémentine Autain qui s’ensuit, est remarqué par Catherine Barma, productrice de l’émission On n’est pas couché sur France 2. C’est à partir de septembre 2006 qu’il rejoint Laurent Ruquier dans cette dernière émission, en compagnie de Michel Polac, puis avec son ami Éric Naulleau. Il est avec eux chargé de procéder à une critique du film, livre ou album présenté. Lors de cette émission, leurs échanges avec des personnalités du monde culturel se terminent parfois en affrontements ou en esclandres qui amènent certains invités à quitter le plateau de l’émission. Laurent Ruquier annonce en 2011 le remplacement de Zemmour et de Naulleau par de nouveaux intervenants, Natacha Polony et Audrey Pulvar. Dans les dernières années de l’émission et par la suite, les relations entre Zemmour et Ruquier se détériorent, ce dernier déclarant en 2015 « regrette[r] » d’avoir donné la parole à Zemmour pendant cinq ans.
Zemmour participe aussi à l’émission L’Hebdo, en tant qu’éditorialiste, sur Tempo, chaîne destinée à l’outre-mer. Il y est entouré, entre autres, de Dominique Wolton. Il quitte cette émission de France Ô à la fin de l’année 2010.
À partir de 2010, Zemmour présente sur RTL une brève chronique d’actualités quotidienne, intitulée Z comme Zemmour, dans la matinale de Vincent Parizot. En 2011, à la suite d’une condamnation de Zemmour pour provocation à la discrimination raciale, RTL demande à Zemmour de « veiller au respect des valeurs humanistes de la station ». À la rentrée 2012, cette chronique devient bihebdomaire dans la matinale de Laurent Bazin puis d’Yves Calvi (mardi et jeudi) et s’intitule On n’est pas forcément d’accord. Il y confronte d’autre part son point de vue dans un débat hebdomadaire avec Nicolas Domenach ou Alain Duhamel. À la rentrée 2018, Zemmour ne participe plus à la matinale, mais seulement en débatteur invité le vendredi. Le 3 octobre 2019, RTL annonce cesser sa collaboration avec Zemmour à la suite de ses incitations à la haine religieuse.
À partir de septembre 2011, il anime, en duo avec Éric Naulleau, Zemmour et Naulleau, des talk-shows hebdomadaires sur Paris Première.
Au milieu des années 2010, les interventions de Zemmour suscitent un intérêt grandissant. Ainsi, Ça se dispute aura été la seule émission qui permet à I-Télé de devancer sa principale concurrente, BFM TV, tandis que Zemmour et Naulleau devient rapidement « la plus puissante » deuxième partie de soirée de Paris Première. Un sondage réalisé par l’Ifop pour Valeurs actuelles en 2014 indique que 30 % des sondés ont une bonne ou très bonne opinion de lui, contre 42 % ayant une mauvaise ou très mauvaise opinion, tandis que 28 % disent ne pas le connaître.
Éditorialiste dans Face à l’info sur CNews
À partir du 14 octobre 2019, Éric Zemmour participe à la nouvelle émission Face à l’info, programmée du lundi au jeudi de 19 h à 20 h sur CNews. Pendant trente minutes, il débat de l’actualité avec d’autres chroniqueurs, notamment Marc Menant, sur un plateau animé par Christine Kelly. Un duel, arbitré par Christine Kelly, l’oppose ensuite à un contradicteur. Par la suite, ce duel intervient seulement le vendredi, pendant une heure. CNews multiplie par trois son audience lors de sa première intervention.
Le 22 octobre, le parti La France insoumise déclare ne plus vouloir se rendre à CNews tant que le polémiste y sera présent. Le 24 octobre, les élus du personnel du groupe Canal+ exigent à l’unanimité le départ de Zemmour de CNews, invoquant des raisons économiques et de sécurité pour le personnel, ainsi que d’éthique et d’image pour le groupe. Des élus LREM, de la CGT et des personnalités telles que l’économiste Jacques Attali ou la journaliste Valérie Trierweiler boycottent également la chaîne du fait de la présence de Zemmour. De nombreux publicitaires font de même.
Le 29 octobre, le groupe Canal+ décide de ne plus diffuser l’émission en direct du fait, selon Le Monde, « de nombreux dérapages d’Éric Zemmour ». Le chroniqueur avait notamment déclaré que Bachar el-Assad « n’a pas gazé son peuple mais des gens qui étaient ses adversaires », que « soit on couche avec l’autre sexe et on fait des enfants, soit on ne couche pas avec l’autre sexe et on n’a pas d’enfants », que Pétain aurait sauvé les « Juifs français » de la déportation en sacrifiant les « Juifs étrangers » (propos pour lesquels il a été relaxé par la justice) et qu’il faudrait, pour être français, prendre le point de vue de la France et renoncer au point de vue de ses ancêtres, y compris en étant « du côté du général Bugeaud », qui en Algérie a « commencé à massacrer les musulmans et même certains juifs ». Début décembre 2019, le CSA met en demeure CNews pour des propos de Zemmour sur la colonisation de l’Algérie.
Face à l’Info améliore notablement son audience. En novembre 2019, CNews prend la tête des chaînes d’information, sur la tranche horaire de l’émission, devant BFM TV et LCI. Le 3 mai 2021, CNews dépasse BFM TV pour la première fois sur une journée grâce en particulier à Zemmour et Pascal Praud.
Le 8 septembre 2021, le CSA demande aux médias audiovisuels de comptabiliser le temps de parole de Zemmour au motif qu’il devient « un acteur du débat politique national ». En conséquence, le 13 septembre, CNews annonce se séparer du chroniqueur.
Parcours politique
Candidat à l’élection présidentielle de 2022
Fin de ses activités de journaliste
À partir de 2019, une possible candidature d’Éric Zemmour à l’élection présidentielle de 2022 est évoquée alors qu’aucun candidat naturel n’émerge au sein de la droite classique. Avec Patrick Buisson, dont il est un proche, Zemmour annonce alors réfléchir à une « plateforme d’idées pour la droite ». Les médias relèvent la présence dans son entourage de la jeune énarque Sarah Knafo, qui joue les intermédiaires afin de préparer sa candidature au sein de la droite.
L’association « Les Amis d’Éric Zemmour » est lancée en avril 2021, tandis que le collectif « Génération Z » rassemble ses jeunes partisans.
Alors que les médias indiquent qu’il a commencé à chercher les 500 parrainages nécessaires pour se présenter, il fait parvenir à des élus une brochure intitulée « Mieux connaître Éric Zemmour » afin de les convaincre de lui accorder leur parrainage. Selon Le Canard enchaîné, il y affecte une posture quasiment « chiraquienne », bien éloignée de ses invectives habituelles. Dans le même temps, il lance son site internet « Croisée des chemins », et commence une série de conférences à travers la France. Jean-Loup Adenor de Marianne note qu’« à mesure que l’élection présidentielle se rapproche, l’éditorialiste-vedette de CNews semble vouloir se donner une envergure nouvelle, quitte à tordre la réalité », comme lorsque, condamné pour « incitation à la haine », il répond : « J’ai été condamné pour délit d’opinion. […] Je ne suis pas un délinquant, je suis un dissident ».
Plusieurs personnalités politiques s’interrogent sur un possible mélange des genres d’un éditorialiste qui se comporterait comme un homme politique laissant planer le doute sur sa candidature, ainsi que sur l’opportunité de décompter son temps de parole et ses déplacements dans les comptes de campagne en vertu de la réglementation sur le pluralisme. À compter du 9 septembre 2021, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) demande aux chaînes de télévision de comptabiliser son temps de parole. Cette décision divise la classe politique et Zemmour dénonce le fait que « le CSA prend désormais le relais des juges ». Alors que CNews annonce dans la foulée l’arrêt de sa participation à Face à l’info et que Paris Première suspend Zemmour et Naulleau, le polémiste lance sa chaîne YouTube.
Assurant la promotion de son nouveau livre La France n’a pas dit son dernier mot, il fait l’objet d’une forte médiatisation, suscitant un débat sur la « fabrication » de sa candidature par la presse. D’après Le Monde, Vincent Bolloré a une inimitié envers Emmanuel Macron, qu’il suspecte d’être intervenu en sa défaveur dans plusieurs affaires, et souhaite qu’il ne soit pas réélu en 2022. D’autres journaux font état d’une « triangulation » entre Macron, Zemmour et Bolloré – d’après eux « principal sponsor » du journaliste – afin d’assurer sa qualification au second tour de l’élection présidentielle face au président sortant. Selon Le Monde, Bolloré a une forte affinité idéologique avec Zemmour, communiquerait avec lui tous les jours par téléphone et serait à l’origine d’un temps de parole très important sur CNews – qualifiée par le quotidien de « fer de lance dans la campagne électorale » pour 2022 -, que ce soit directement ou par le biais des commentaires des intervenants. Le reste des médias français hésitent entre inviter et boycotter Zemmour, qui enregistre de fortes audiences lors de ses interventions.
Préparation de sa candidature
À partir du milieu de l’année 2021, les instituts de sondage testent Éric Zemmour dans les intentions de vote à l’élection présidentielle de 2022. Crédité de 5 % au premier tour à l’été 2021, il connaît une forte progression en septembre suivant. Sa possible candidature est encouragée par Patrick Buisson et Jacques Bompard et soutenue par une grande partie de l’ultra-droite et de ses figures, dont Renaud Camus, Jean-Yves Le Gallou, Julien Rochedy, Hervé Ryssen – malgré son antisémitisme -, ou encore Daniel Conversano.
En octobre, tandis qu’un quartier général de campagne est aménagé au 10 rue Jean-Goujon dans le 8e arrondissement de Paris, les enquêtes d’opinion le donnent comme potentiellement qualifié pour le second tour s’il se présentait, avec 15 à 18 % des sondés en sa faveur, obtenant une partie de l’électorat des Républicains et surtout de celui de Marine Le Pen, qui se trouve reléguée en troisième position pour la première fois depuis 2013. Les semaines suivantes voient les intentions de vote reculer.
Le 30 novembre 2021, il officialise sa candidature par le biais inédit d’une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, dont la scénographie s’inspire de l’appel du 18 juin et qui utilise des images sans les autorisations des ayants droit. Plusieurs d’entre eux portent plainte et, le 4 mars 2022, Zemmour et son parti « Reconquête » sont condamnés par le tribunal judiciaire de Paris pour « contrefaçon de droits d’auteur » et « atteinte au droit moral ». Conséquemment, le 10 mars 2022, cette vidéo est retirée par la plate-forme YouTube elle-même, ce retrait ne s’appliquant que sur la France.
Dans ses interventions, Zemmour se présente comme « le candidat de la droite, de ce qu’on appelait autrefois le RPR », prônant le « rassemblement de la droite populaire, bonapartiste, qui rassemble les classes populaires et la bourgeoisie patriote ». Il défend notamment l’arrêt de l’immigration, la suppression du droit du sol, la fin du regroupement familial ou encore la préférence nationale pour les prestations sociales. Le Figaro voit de nombreuses similitudes entre ses propositions et celles du RPR et de l’UDF du début des années 1990, tout en notant un discours plus incisif envers l’islam. Au sein des LR, les avis sont partagés : certains se disant agacés par sa présence dans la campagne, tandis que d’autres la voient d’un œil favorable. En 2019, Laurent Wauquiez l’avait accueilli au siège du parti en disant qu’il était « chez lui ». Alors que sa participation à la primaire de la droite est défendue par des élus LR, Zemmour dresse un portrait élogieux d’Éric Ciotti – finaliste de la primaire ayant déclaré qu’il voterait en sa faveur en cas de second tour face à Emmanuel Macron -, soulignant leur proximité d’idées et conviant les électeurs de celui-ci à son premier meeting de campagne.
Meeting de Villepinte et création de Reconquête
Lors du lancement de sa campagne le 5 décembre 2021, à l’occasion d’un meeting réunissant entre 13 000 et 15 000 personnes au parc des expositions de Paris-Nord Villepinte, Éric Zemmour annonce le nom à venir de son parti politique, Reconquête, en vue des élections présidentielle et législatives de 2022 ; ce nom, qui peut faire référence à la Reconquista de la péninsule Ibérique par des royaumes chrétiens contre les États musulmans du VIIIe siècle au XVe siècle, aurait été choisi par Sarah Knafo depuis plusieurs années. À cette occasion, il reçoit le soutien public de Jean-Frédéric Poisson, président de Via, la voie du peuple, et de Jacline Mouraud, militante du mouvement des Gilets jaunes et présidente du mouvement Les Émergents – qui retirent tous deux leurs candidatures à la présidentielle et s’expriment en sa faveur – ainsi que de Paul-Marie Coûteaux, Christine Boutin et Laurence Trochu, présidente du Mouvement conservateur.
À son arrivée, un homme récemment encarté chez Les Républicains agresse Zemmour. Par ailleurs, des journalistes de l’émission de télévision Quotidien sont pris à partie et des militants de SOS Racisme ayant organisé un happening dans la salle sont violemment frappés, ces violences étant revendiquées par les Zouaves Paris, un groupe d’extrême droite composé d’anciens du GUD et de l’Action française, visé par une procédure de dissolution. À la suite du meeting un militant noir, Tanguy David, qui se trouvait parmi les militants, est pris à partie et ciblé par des injures racistes et des menaces de mort.
Le 15 décembre, dix jours après l’annonce du lancement de son parti, le candidat revendique 60 000 adhérents. Le 25 janvier suivant, le parti dépasse les 85 000 membres – un nombre vérifié par un huissier de justice -, ce qui en ferait le deuxième parti français aux cotisations payantes.
Équipe de campagne et ralliements
Proche conseillère d’Éric Zemmour, Sarah Knafo occupe officiellement la fonction de directrice stratégique de la campagne, elle exerce également plusieurs postes-clés dans l’équipe de campagne (plume, conseillère spéciale, directrice de la communication). Bertrand Houitte de La Chesnais, général de corps d’armée (2S), ancien major général de l’Armée de terre, est nommé directeur de campagne, tandis que Jean-Paul Bolufer, préfet honoraire à la retraite, énarque proche de la droite catholique, est chef de cabinet au sein de l’équipe. Zemmour se dote également d’une « équipe numérique », supervisée par Samuel Lafont, avec une dizaine de personnes surveillant les informations présentes à son sujet sur internet et sur Wikipédia en français, dont elle tente de manipuler plusieurs pages.
Parmi les 56 figures-clés de l’équipe de campagne identifiées par Le Monde en décembre 2021, 21 sont passées par le Rassemblement national (RN), sept sont proches de Marion Maréchal, 21 ont (ou ont eu) des liens avec Les Républicains, six sont issues de la droite catholique et proches de La Manif pour tous, trois ont eu des liens avec des mouvements identitaires d’extrême droite, sept sont liées à l’armée. D’anciens cadres et militants du Mouvement national républicain participent également à la campagne et notamment à la rédaction du programme. Selon Le Monde, il s’agit de « la première fois dans l’histoire de la Cinquième République [qu’]un candidat à la présidence fait voler en éclats la digue qui séparait la droite républicaine de l’extrême droite, rassemblant dans la même équipe des représentants de ces deux familles, autrefois violemment antagonistes, et agrégeant plusieurs de leurs composantes ».
Le 11 décembre, le souverainiste de droite Philippe de Villiers apporte son soutien à Zemmour, intégrant le comité politique de la campagne, où siègent également Jean-Frédéric Poisson, Jean-Yves Le Gallou et Laurence Trochu. Le 9 janvier suivant, Guillaume Peltier, député et membre de LR – dont il était numéro deux jusqu’en juillet 2021 -, annonce son ralliement à Éric Zemmour, dont il devient le porte-parole. Le même mois, Jérôme Rivière, député européen RN et président de la délégation française du groupe Identité et démocratie au Parlement européen, annonce son soutien à Zemmour et devient son porte-parole, suivi par Damien Rieu, ancienne figure de Génération identitaire et assistant parlementaire de l’eurodéputé RN Philippe Olivier. Le 22 janvier, Zemmour est rejoint par Gilbert Collard, député européen RN, qui est nommé président d’honneur de Reconquête. Bruno Mégret fait de même quelques jours plus tard.
De nombreux référents locaux du parti sont issus des rangs du Rassemblement national ou de la mouvance identitaire. Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite, estime après les ralliements de Jérôme Rivière et de Damien Rieu à Zemmour que Reconquête s’annonce comme « le véritable parti des identitaires ». Lors d’un débat contre la candidate Valérie Pécresse, celle-ci lui reproche de s’être entouré de sympathisants négationnistes, comme Tristan Mordrelle et Philippe Schleiter, neveu du négationniste Robert Faurisson.
Financement de la campagne
L’équipe d’Éric Zemmour avance être financée principalement par les adhésions à Reconquête, avec une moyenne de « 700 à 800 adhésions par jour » en décembre 2021 et un total de 80 000 adhérents au parti au début de l’année 2022. La cotisation d’adhésion classique étant de 30 euros, la somme collectée à ce titre s’élèverait à au moins 2,4 millions d’euros en janvier 2022.
Le collectif « Les Amis d’Éric Zemmour » – qui a obtenu l’agrément d’association de financement politique le 31 mai 2021 et est devenu Reconquête en décembre suivant -, indique avoir recueilli six millions d’euros de 25 000 donateurs. Dès avril 2021, soit plusieurs mois avant la déclaration de candidature, ce collectif avait commencé à lever des fonds, avec notamment des dîners discrètement organisés à partir de mai à Paris et à l’étranger. Le collecteur est Julien Madar, employé dans l’immobilier de luxe, assisté d’une dizaine d’autres personnalités de la finance ou des médias, comme Paul-Marie Coûteaux. Le millionnaire d’extrême droite Charles Gave apporte également un soutien financier, avant de le lui retirer en novembre 2021.
D’après une enquête de Mediapart (fondée en partie sur la liste des 1 000 « invités VIP » au meeting de Villepinte), les grands donateurs (ceux ayant donné entre 1 000 et 7 500 euros) sont « issus des milieux financiers et d’affaires », « cadres dans des banques, fonds d’investissement, hedge funds », « cadres évoluant dans des cabinets de conseil, des groupes industriels ou dans le secteur immobilier » (notamment des cadres dirigeants de Vinci et Chanel) et « avocats d’affaires ou fiscalistes, en poste dans de grands cabinets français ou internationaux ». S’y trouverait notamment Chantal Bolloré, sœur du milliardaire Vincent Bolloré et « éminence grise » de Zemmour. Parmi les autres personnalités identifiées figurent Sonia et Alexandre Poussin, l’ancien chanteur Pierre Beraud-Sudreau ou encore Xavier Caïtucoli. Si certains sont des soutiens de l’extrême droite de longue date, une part importante est constituée d’anciens fillonnistes.
Défaite dès le premier tour
Après avoir médiatiquement dominé la campagne et réussi à imposer ses thèmes de campagne à la droite, il parvient à culminer à 18 % dans les intentions de vote. Le 10 avril 2022, au soir du premier tour, il subit une déroute en arrivant quatrième de l’élection, loin derrière le trio de tête, avec un résultat approchant les 7,07 % de vote. Dans un discours donné depuis la Maison de la Mutualité à Paris, il déclare ne devoir « aucun de ses échecs » à son équipe, et reconnaît avoir commis des « erreurs ». Il appelle ensuite ses électeurs à voter pour Marine Le Pen, qualifiée pour le second tour une nouvelle fois.
Échec lors des élections législatives de 2022
Candidat aux élections législatives de 2022 dans la quatrième circonscription du Var, Éric Zemmour est éliminé dès le premier tour en arrivant en troisième position avec 23,19 % des suffrages exprimés, à 1,5 point du candidat du Rassemblement national, Philippe Lottiaux. Par ailleurs, aucun candidat de Reconquête, qui réalise un score de 4,24 % à l’échelle nationale, ne parvient à se qualifier pour le second tour du scrutin.
Tensions et polémiques après les élections
Après les deux échecs électoraux d’Éric Zemmour, plusieurs personnalités du parti se mettent progressivement en retrait parmi lesquelles Antoine Diers, le directeur adjoint de la stratégie de campagne, Jean Messiha, ou encore Philippe de Villiers. En juin 2022, lors d’une réunion du comité politique du parti, des tensions apparaissent sur le fonctionnement du parti, jugé « autocratique » par plusieurs membres qui dénoncent « la mainmise de Guillaume Peltier et de Sarah Knafo sur le fonctionnement ». Selon certains membres, alors qu’il lui était reproché de ne pas savoir s’adresser aux français les plus modestes, Éric Zemmour aurait déclaré que les « classes populaires sont trop analphabètes » pour qu’il puisse leur parler, ce qu’il dément. À l’été 2022, Éric Zemmour lance une « consultation nationale » auprès de ses militants afin de recueillir leur opinion sur le fonctionnement interne du parti, ainsi que sur les propositions et les propos que l’ex-candidat a tenus lors des campagnes électorales.
En octobre 2022, Éric Zemmour et Reconquête sont accusés de récupération politique alors que Samuel Lafont achète plusieurs noms de domaine au nom de « Lola », une jeune fille de douze ans assassinée à Paris quelques jours plus tôt. Invité sur le plateau de BFM TV le 28 octobre, Zemmour déclare « assumer » qu’il n’aurait pas appelé à manifester si la meurtrière de la jeune femme avait été d’origine française, ce qui crée la polémique. Il emploie de plus en plus fréquemment le terme de « francocide ». Le soir-même, il se rend à un rassemblement organisé par l’Institut pour la justice sur la place Denfert-Rochereau. Plusieurs membres de l’Action française, des Zouaves Paris et de l’extrême-droite francaise sont également présents. Alors qu’il avait initialement prévu de s’y rendre, le Rassemblement national décide au dernier moment d’annuler sa venue, préférant organiser une minute de silence devant l’Assemblée nationale.
Dans les semaines qui suivent, le parti d’Éric Zemmour « réduit de plus en plus son audience à l’ultra-droite », selon Le Journal du dimanche, pour lequel « Zemmour se voit plus en prophète qu’en véritable leader politique ».
Le 4 décembre 2022, Éric Zemmour organise au Dôme de Paris un meeting anniversaire de son parti, un an après la création de celui-ci. Il rassemble 4 000 personnes.
Dans le même temps, selon France Info, une « bataille interne » opposerait Éric Zemmour à Marion Maréchal afin de désigner qui sera la tête de liste du parti aux élections européennes de 2024. C’est finalement cette dernière qui est choisie, Eric Zemmour figurant en 80ème et avant-dernière position sur la liste.
Le 4 mai 2024, il est la cible d’injures lors de sa venue au marché d’Ajaccio. Il frappe une femme qui a jeté un œuf sur lui alors que cette dernière est maintenue et immobilisée par ses gardes du corps.
Positionnement politique
Évocation de la gauche
Éric Zemmour affirme avoir voté deux fois pour François Mitterrand et avoir rompu avec la gauche, selon les versions, au milieu des années 1980 avec l’avènement de SOS Racisme, ou après l’affaire de Creil en 1989. Lors de la campagne du référendum français sur le traité de Maastricht en 1992, il revendique son attachement à Philippe Séguin et Jean-Pierre Chevènement. Il fait par ailleurs l’éloge de Georges Marchais, secrétaire général du Parti communiste français de 1972 à 1994, parce qu’il justifia l’intervention soviétique en Afghanistan et recommanda d’« arrêter l’immigration ». L’universitaire Philippe Corcuff relève qu’« il fait aussi nombre de références positives à Jean-Claude Michéa et à l’essayiste Christophe Guilluy, tout en n’hésitant pas à utiliser la notion de “classes”, antérieurement souvent réservé aux marxistes et autres anticapitalistes de gauche ».
Polémiste d’extrême droite la plus radicale
À partir de 2010, il apparaît comme une figure des sites de droite radicale, souverainistes, identitaires, anti-immigration et anti-islam. Il salue le rapport au peuple et le patriotisme de Jean Jaurès et se définit comme « gaullo-jaurésien » et « bonapartiste » puis comme « gaullo-bonapartiste », et se déclare partisan « de la grandeur de la France, de la force de l’État et du respect de la tradition culturelle française », il est communément décrit comme un « polémiste d’extrême droite ». Selon le journaliste Dominique Albertini de Libération, il se situe sur un segment politique d’une extrême droite plus radicale que le Rassemblement national, avec un discours « sous-tendu par le référent ethnique et le fantasme d’un « grand rembarquement » des immigrés, et de tout ou partie de leurs descendants ». Le journaliste Maurice Szafran fait la même analyse, le jugeant « à l’extrême droite de l’extrême droite » lorsqu’il qualifie en 2016 Marine Le Pen de « candidate de gauche complètement endoctrinée par Philippot ».
Passeur d’idées d’extrême droite efficace
L’historien Laurent Joly considère en 2015 que « depuis Barrès et Maurras, aucun autre intellectuel, journaliste ou écrivain, n’avait eu ce statut de passeur des idées d’extrême droite auprès d’un très large lectorat ». Le journaliste et écrivain Éric Dupin écrit en 2017 : « Enivré par ses succès télévisuels, le gaulliste anticonformiste qu’il était il n’y a pas si longtemps s’est ainsi mué en démagogue d’extrême droite ». En 2021, la journaliste au Monde Zineb Dryef considère qu’il est passé du statut de chroniqueur à celui de militant de l’extrême droite. Zemmour réfute lui-même la qualification d’« extrême droite », invoquant la « vieille méthode stalinienne des années 1930, qui consiste à traiter de « fascistes » tous ses adversaires ». En vue de l’élection présidentielle de 2022, il indique ne proposer « rien de plus que le RPR en 1990 ». La journaliste Marie-France Etchegoin rapporte en 2020 les propos suivants de Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de Valeurs actuelles : « Pour la progression de notre courant de pensée, Éric a fait plus que le Front national en quarante-cinq ans d’existence ».
Dédiabolisation du Rassemblement national
Le Monde indique que Zemmour a déjeuné, en janvier 2020, avec Jean-Marie Le Pen et Ursula Painvin, fille de Joachim von Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du IIIe Reich, pendu en 1946 après le procès de Nuremberg – le quotidien note que depuis Berlin, Ursula Painvin « encourage Éric Zemmour avec ses “pensées les plus admiratives et amicales” ». Ses fréquentations et ses prises de position politique font dire au journaliste Georges-Marc Benamou : « Zemmour, c’est une expression névrotique du décret Crémieux. Éric a besoin d’être accepté par les antisémites. Il est l’idiot utile, au sens hégélien, de l’extrême droite antisémite. L’ironie, c’est que, dans le cas d’espèce, l’idiot utile est un juif brillant qui a du talent ». Selon Georges-Marc Benamou, « La violence, la raideur idéologique d’Éric Zemmour ont fait de Marine Le Pen une femme qui aime les chats ». Le politologue Pierre Vercauteren juge qu’Éric Zemmour « a réussi à achever la dédiabolisation de Marine Le Pen et lui aura permis de s’élever encore plus dans les sondages ».
Positionnement vis-à-vis de la droite conventionnelle
En septembre 2019, quelques mois après avoir été accueilli « chez lui » au siège de LR selon les termes de son président Laurent Wauquiez, il participe à la « convention de la droite » organisée par des proches de Marion Maréchal. L’historien Tal Bruttmann écrit : « Il ne s’agit plus des propos d’un polémiste frayant avec l’extrême droite, mais d’un discours s’inscrivant ouvertement dans la veine du fascisme, assumé et revendiqué comme tel ». Tal Bruttmann estime que le programme politique de Zemmour se résume à la « lutte des races » et que son discours ferait passer Pétain et Maurras pour des modérés. L’historien Gérard Noiriel compare la rhétorique identitaire et le discours anti-islam du polémiste aux imprécations antisémites d’Édouard Drumont. Sa proximité avec Marion Maréchal est soulignée par la presse en septembre 2021 alors qu’il participe depuis 2015 à un rendez-vous phare des droites dures européennes, le « sommet démographique international » de Budapest, à l’invitation du Premier ministre Viktor Orbán et où il s’affiche pour la seconde fois aux côtés de la nièce de Marine Le Pen, qui lui exprime publiquement sa sympathie.
Éric Zemmour a voté François Fillon, le candidat des Républicains au 1er tour et Marine Le Pen, la candidate du Front national au 2ème tour lors des élections présidentielles de 2017.
Positionnement analysé par Nicolas Lebourg
D’après l’historien Nicolas Lebourg, la pensée politique de Zemmour se définit par quatre éléments. Le premier est un bonapartisme : Zemmour croit en l’importance des « grands hommes » dans le destin d’une nation. Le second est un « unitarisme » – une importance vitale est donnée à l’unité. Le troisième est un « souverainisme intégral » : Zemmour pense que tous les problèmes peuvent être résolus par la souveraineté de l’État-nation. Et le quatrième élément est un « nationalisme obsédé par la décadence », qui prend la forme d’une sorte de darwinisme : si le peuple français n’évolue pas, il sera « balayé de l’Histoire ». Pour Zemmour, les pays sont dans une compétition à mort. En octobre 2021, Nicolas Lebourg situe Zemmour à l’extrême droite au regard de son organicisme et de sa précampagne de type national-populiste ; il estime que « sa conception d’un nationalisme ethnique et son libéralisme font songer au Club de l’horloge », et qu’il « évoque d’ailleurs le plus célèbre des « horlogers », Bruno Mégret, lorsqu’il était numéro 2 du FN dans les années 1990 ». En mars 2022, Lebourg situe également Zemmour au sein de l’illibéralisme pour son rejet de la limitation de l’action de l’État français par des instances telles que le Conseil constitutionnel ou la Cour de justice européenne.
Droite hors les murs
Jean-Yves Camus, politologue et co-directeur de l’Observatoire des radicalités politiques, range le positionnement de Zemmour dans la « droite hors les murs », une droite identitaire « formée de gens qui ne se retrouvaient plus ni dans LR […] ni dans le RN ». Le politologue estime que Zemmour ne peut pas être considéré comme un homme d’extrême droite, dans le sens où il n’est pas lié « aux expériences fascistes, nazies, à la collaboration » et n’est pas fasciste. Camus estime qu’une différence notable entre Marine Le Pen et Zemmour est que ce dernier manifesterait un pessimisme et une absence d’espoir que n’aurait pas la dirigeante du RN. Pour lui, le rêve de Zemmour d’unir droite classique et extrême droite en se disant l’héritier du RPR des années 1980 qui faisait des alliances avec le FN, a évolué « vers des rivages bien plus radicaux que le RPR des années 80 », en devenant presque « contre-révolutionnaire » avec « une ethnicisation des termes, du débat » en reprenant la thèse du « grand remplacement ». L’avalisation de cette thèse implique selon Jean-Yves Camus non seulement un arrêt de l’immigration, mais à terme une « remigration ».
Le politologue Gaël Brustier et les journalistes Ariane Chemin et Olivier Faye classent également Zemmour dans la « droite hors les murs », une droite comprenant notamment Philippe de Villiers et Patrick Buisson, et qui, selon Brustier, voulait peser lors de la présidentielle de 2017 à la fois sur le programme des Républicains et du Front national.
Laurent de Boissieu estime que, Marion Maréchal s’étant retirée de la vie politique, Zemmour représente la meilleure synthèse propre à la « droite hors les murs » : un protectionnisme économique aux frontières comme le voudrait le RN, un « libéralisme intérieur » comme présenté par le programme de François Fillon (LR) en 2017, un refus de la sortie de l’UE, et un conservatisme typique de La Manif pour tous. Selon Laurent de Boissieu, la « droite hors les murs » est surtout une « extrême droite hors les murs » du RN, le « paradoxe » d’Éric Zemmour étant que, sur l’identité et l’immigration, « ses idées sont plus extrémistes que celles de Marine Le Pen : lutte contre l’islam et pas uniquement contre l’islamisme, appropriation des concepts de l’extrême droite « identitaire » (« grand remplacement », « remigration ») ».
Publications
Essais
- 1995 : Balladur, immobile à grands pas, Paris, éditions Grasset
- 1997 : Le Coup d’État des juges, Paris, editions Grasset
- 1998 : Le Livre noir de la droite, Paris,éditions Grasset
- 1998 : Une certaine idée de la France, collectif, Paris, éditions France-Empire
- 2000 : Les Rats de garde avec Patrick Poivre d’Arvor, Paris, éditions Stock
- 2002 : Chirac, l’homme qui ne s’aimait pas, Paris, éditions Balland
- 2006 : Le Premier Sexe, Paris, éditions Denoël ; rééd. augmentée J’ai lu, 2009
- 2010 : Mélancolie française, Paris, Librairie Arthème Fayard/Denoël ; rééd. Le Livre de poche, 2011
- 2011 : Z comme Zemmour, Paris, Le Cherche midi
- 2011 : participation à Philippe Muray, Paris, Le Cerf, coll. « Cahiers d’histoire de la philosophie »
- 2012 : Le Bûcher des vaniteux, Paris, éditions Albin Michel
- 2013 : Le Bûcher des vaniteux 2, Paris, éditions Albin Michel
- 2014 : Le Suicide français, Paris, éditions Albin Michel
- 2016 : Un quinquennat pour rien, Paris, éditions Albin Michel
- 2018 : Destin français, Paris, éditions Albin Michel
- 2021 : La France n’a pas dit son dernier mot, Paris, Rubempré
- 2023 : Je n’ai pas dit mon dernier mot, Paris, Rubempré
Romans
- 1999 : Le Dandy rouge, Plon
- 2004 : L’Autre, éditions Denoël
- 2008 : Petit Frère, éditions Denoël ; rééd. J’ai lu, 2009.
Prix littéraires
Éric Zemmour a reçu les prix littéraires suivants :
- le prix du livre incorrect 2010, pour Mélancolie française ;
- le prix Richelieu 2011 ;
- le prix Combourg Chateaubriand 2015, pour Le Suicide français.